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Cultural industries

Soumission, par Laurence Cossé (La Croix - 9 septembre 2016)

La chronique de Laurence Cossé, le 07/09/2016 à 11h19

L’année dernière, croyant passer un bon moment à un concert, j’ai fait une expérience pénible à laquelle chaque jour depuis m’a renvoyée et me renvoie. C’était au soir d’un colloque organisé au Sénat, à Paris, par une association que j’admire. Une grande banque française avait offert le concert de clôture. Ce type de mécénat fait coup double, la banque donne du travail à des musiciens dont elle reconnaît le talent et apporte son concours à une association qu’elle veut encourager.
On avait annoncé un concert de rhythm and blues. C’était plutôt du rock – peu importe. Il y avait cinq musiciens sur scène, une chanteuse et quatre instrumentistes, français tous les cinq. Et se sont succédé des tubes tous empruntés au répertoire américain des trente dernières années. Pour les présenter, l’un après l’autre, la chanteuse s’exprimait bien sûr en français. Mais au premier accord, elle passait à l’anglais.
Une association française, une banque française, le Sénat, Paris, France, des musiciens français : et au total, ce spectacle qui m’est vite apparu insupportable d’un public entièrement français semblant trouver tout à fait normal que la journée d’études sur son activité en France se conclue par un concert américain. Il y avait là quelque chose de l’ordre de la soumission volontaire d’un peuple colonisé à son colonisateur. J’ai entendu la voix caverneuse du Général fulminer : « Les Français sont des veaux ».
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