Frédéric Pennel: «Le français devient une langue de contre-pouvoir» (Le Figaro)

INTERVIEW - Le français est-il en guerre? Contre l’anglais? Frédéric Pennel, journaliste et auteur d’un passionnant essai intitulé Guerre des langues, analyse ces questions.

Par Alice Develey, p

Avec 300 millions de locuteurs du français dans le monde, la langue de Molière ne connaît plus de frontières. Comment se porte-t-elle aujourd’hui? Le français fait-il toujours rêver? Le journaliste Frédéric Pennel publie Guerre des langues (Bourin Francois Eds), un stimulant essai sur le statut et l’histoire de la langue française dans le monde.

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LE FIGARO. - Votre livre s’intitule Guerre des langues. La langue française est-elle en guerre?

Frédéric PENNEL. - La planète fait figure de tour de Babel. Les langues sont soit dominantes, en expansion, soit dominées, en rétractation. Une vingtaine environ disparaît même chaque année. Dans l’expression «guerre des langues», il faut entendre une forme de darwinisme à l’instar de ce qu’il se passe dans la nature. C’est-à-dire, un phénomène dramatique pour la préservation de la richesse culturelle des langues sur la planète.

Cette expression de «guerre des langues» revêt aussi un aspect éminemment politique. Les États ajoutent en effet leur grain de sel à ce phénomène darwinien et propagent leur langue notamment à travers des diplomaties culturelles. Cela se constate par le biais d’institutions spécifiquement dédiées. À la fin du XIXe siècle, la France a déployé un véritable arsenal pour la diffusion de sa langue, un dispositif encore d’actualité, avec les «lycées français», alliances ou instituts français. Aujourd’hui, on voit ce même combat mené par la Chine qui déploie ses instituts Confucius partout dans le monde. Pour diffuser une culture, le plus efficace est de répandre une langue. D’où des luttes d’influence très importantes. C’est à qui arrivera à exporter le plus largement sa langue.

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